Le soleil se rapproche peu à peu de l'horizon. Les courbes lisses des montagnes environnantes se colorent doucement de rose, et les ombres de nos avions s'allongent sur le bitume noir du parking de Klamath Falls. Pendant que l'employé du FBO fait les pleins du Cessna, je déambule tranquillement sur le tarmac. C'est une agréable fin de journée, sereine. L'air est parfaitement immobile, et le ciel d'un bleu pâle, d'une pureté typiquement montagnarde.
Klamath Falls Airport (KLMT), c'est la destination que nous avions été contraints d'abandonner le mercredi précédent, lorsque nous étions à trois par avion en partant d'Oakland : perché à une altitude de 4000 pieds (1300 mètres), il aurait pu nous poser quelques difficultés pour faire décoller un Cessna trop chargé, même avec une piste longue de trois kilomètres. C'est également là qu'est basée la 173rd Fighter Wing, une escadrille de chasseurs de la garde nationale de l'Oregon. A quelques dizaines de mètres de nos trapanelles, les formes massives et menaçantes des F-15 Eagle, alignées proprement sur leur parking, rayonnent une puissance calme et maitrisée. Leurs fuselages gris mat sont couverts d'une multitude de petits rubans rouges remove before flight qui pendent, inertes, dans l'atmosphère tranquille. Derrière eux, un hangar porte fièrement les écussons de la wing et du squadron, ainsi qu'une devise no slack.
Un simple petit panneau rouge, posé à même le sol, sépare la zone militaire de la zone civile : Restricted operations area, only authorized personnel/vehicles beyond this point.
Vincent prépare sa navigation. Je vais payer l'essence, et je me retrouve à discuter avec l'employé du FBO. Nous parlons d'avions d'armes, du meeting du Bourget, et du Eagle d'un autre squadron qui, plus tôt dans la journée, été garé juste à l'endroit où nous attend notre Cessna. Nous serions arrivés plus tôt, j'aurais peut-être eu la chance de voir la machine de près et de rencontrer son pilote.
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Voilà de nouveau l'ambiance surnaturelle du vol de nuit. Notre petit espace de réalité, bercé par le ronronnement lancinant du moteur, flotte doucement dans un océan d'encre. Pas de routes, pas de villages, pas de lumières, pas de repères ; on devine seulement un horizon irrégulier, le noir absolu des montagnes se découpant imperceptiblement sur le bleu épais du ciel.
Le cockpit du Cessna est à peine éclairé par le halo discret des instruments. Je suis notre progression sur l'écran du GPS, dont la luminosité est réglée au minimum, et allume de temps en temps ma lampe rouge pour vérifier sur la carte les altitudes des reliefs environnants. Parfois, je m'amuse à croiser deux VORs pour confirmer notre position, et je coche l'intersection sur la carte en notant l'heure de passage. Vincent maintient le Cessna dans un palier parfait, tout droit sur le cap prévu, et nos heures estimées (au prochain point, à l'arrivée, carburant restant...) sont toujours cohérentes et en phase avec celles du GPS. Si j'avais fait une aussi belle navigation le jour de mon test, j'aurais eu une mention.
Nous passons au dessus des formes fractales du lac Shasta, invisibles dans la nuit, et débouchons au dessus de la large vallée qui s'étend jusqu'à la baie de San Francisco. Loin sous nos roues, des îlots de lumière parsèment maintenant l'obscurité : villes, villages et fines routes bordées de lampadaires. Parfois le point isolé d'une voiture sur une route sans éclairage. Sur les aéroports de Redding et Red Bluff, nous distinguons les feux multicolores d'avions en mouvement.
Nous sommes tranquillement descendus à 6000 pieds en longeant la vallée. Ça fait deux heures que nous sommes partis de Klamath Falls, et nous approchons de notre destination. Après un virage à droite en direction du VOR de Scaggs Island, notre dernier point tournant, une masse noire et inquiétante se détache sur un horizon réchauffé par les lumières de la mégalopole. J'allume ma lampe et vérifie les altitudes de sécurité : devant nous, il y a bien une grosse colline qui culmine à 3000 pieds, mais nous croisons toujours à 6000, nous devrions passer largement au dessus. Pourtant, on dirait vraiment qu'une montagne nous barre la route. Prudemment, Vincent décide d'infléchir légèrement son cap vers le sud pour contourner l'obstacle supposé. La colline passe sous notre aile droite, et l'obstacle semble finalement n'être qu'un nuage posé sur son sommet. Comme quoi, tout n'est pas écrit sur les cartes.
En suivant les instructions du contrôleur de NORCAL, nous longeons la baie de San Francisco. Les innombrables lumières qui illuminent la région se reflètent en scintillant dans le miroir laqué de la mer. De nuit, tout est différent, mais nous retrouvons quand même nos repères : San Rafael Bridge, le Golden Gate et les hautes tours du centre ville, le Bay Bridge...
Vincent intègre le circuit en vent arrière pour la piste 27 droite, et il ajoute un deuxième atterrissage de nuit au Metropolitan Oakland International Airport à son tableau de chasse. Cette fois ci, pas besoin de suivre le Duchess : nous allons nonchalamment nous garer chez Kaiser, comme d'habitude.
Dans les locaux de Kaiser, nous retrouvons avec plaisir les Alex. Pendant notre allez-retour à Vancouver, ils ont eu le temps de visiter San Francisco et, une fois leur Cessna réparé, de faire un Bay Tour.
Mais il est tard, et nous sommes tous épuisés. Nous nous entassons à six dans la voiture de location des Alex et traversons le Bay Bridge pour rejoindre notre hôtel, à l'autre bout de San Francisco. Bien entendu, nous avons des chambres avec vue sur les pistes de KSFO, San Francisco International Airport.
Klamath Falls Airport (KLMT), c'est la destination que nous avions été contraints d'abandonner le mercredi précédent, lorsque nous étions à trois par avion en partant d'Oakland : perché à une altitude de 4000 pieds (1300 mètres), il aurait pu nous poser quelques difficultés pour faire décoller un Cessna trop chargé, même avec une piste longue de trois kilomètres. C'est également là qu'est basée la 173rd Fighter Wing, une escadrille de chasseurs de la garde nationale de l'Oregon. A quelques dizaines de mètres de nos trapanelles, les formes massives et menaçantes des F-15 Eagle, alignées proprement sur leur parking, rayonnent une puissance calme et maitrisée. Leurs fuselages gris mat sont couverts d'une multitude de petits rubans rouges remove before flight qui pendent, inertes, dans l'atmosphère tranquille. Derrière eux, un hangar porte fièrement les écussons de la wing et du squadron, ainsi qu'une devise no slack.
Un simple petit panneau rouge, posé à même le sol, sépare la zone militaire de la zone civile : Restricted operations area, only authorized personnel/vehicles beyond this point.
Vincent prépare sa navigation. Je vais payer l'essence, et je me retrouve à discuter avec l'employé du FBO. Nous parlons d'avions d'armes, du meeting du Bourget, et du Eagle d'un autre squadron qui, plus tôt dans la journée, été garé juste à l'endroit où nous attend notre Cessna. Nous serions arrivés plus tôt, j'aurais peut-être eu la chance de voir la machine de près et de rencontrer son pilote.
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Au point d'arrêt, les pieds sur les freins et le moteur rugissant, Vincent mixture consciencieusement pour avoir des performances optimales au décollage. Autour de nous, l'obscurité s'écoule dans les creux du relief : il fait déjà presque nuit.
Nous décollons en n'utilisant qu'une infime portion de la longue piste, et notre vaillant N4975F s'envole vers les quelques étoiles qui commencent à piqueter le firmament. En montée vers 11000 pieds, nous obliquons à droite vers le mont Shasta, dont la masse ténébreuse se découpe sur le gris opaque du crépuscule. A notre altitude de croisière, ce sera la seule montagne plus élevée que nous, l'objectif est donc de le passer avant que la nuit ne l'ai rendu complètement invisible. Des vallons secs et rocailleux défilent rapidement sous nos ailes, nuances indécises de noirs et de bruns profonds contrastant avec la teinte pâle du ciel crépusculaire. Seul l'horizon est encore coloré d'orange vif là où les derniers rayons du soleil sont passés sous l'horizon.
Bientôt, nous passons à droite du sommet du mont Shasta. Gigantesque ombre chinoise, la forme escarpée du volcan se fond désormais avec un ciel de plus en plus sombre. Nous nous enfonçons dans la nuit.
Nous décollons en n'utilisant qu'une infime portion de la longue piste, et notre vaillant N4975F s'envole vers les quelques étoiles qui commencent à piqueter le firmament. En montée vers 11000 pieds, nous obliquons à droite vers le mont Shasta, dont la masse ténébreuse se découpe sur le gris opaque du crépuscule. A notre altitude de croisière, ce sera la seule montagne plus élevée que nous, l'objectif est donc de le passer avant que la nuit ne l'ai rendu complètement invisible. Des vallons secs et rocailleux défilent rapidement sous nos ailes, nuances indécises de noirs et de bruns profonds contrastant avec la teinte pâle du ciel crépusculaire. Seul l'horizon est encore coloré d'orange vif là où les derniers rayons du soleil sont passés sous l'horizon.
Bientôt, nous passons à droite du sommet du mont Shasta. Gigantesque ombre chinoise, la forme escarpée du volcan se fond désormais avec un ciel de plus en plus sombre. Nous nous enfonçons dans la nuit.
Voilà de nouveau l'ambiance surnaturelle du vol de nuit. Notre petit espace de réalité, bercé par le ronronnement lancinant du moteur, flotte doucement dans un océan d'encre. Pas de routes, pas de villages, pas de lumières, pas de repères ; on devine seulement un horizon irrégulier, le noir absolu des montagnes se découpant imperceptiblement sur le bleu épais du ciel.
Le cockpit du Cessna est à peine éclairé par le halo discret des instruments. Je suis notre progression sur l'écran du GPS, dont la luminosité est réglée au minimum, et allume de temps en temps ma lampe rouge pour vérifier sur la carte les altitudes des reliefs environnants. Parfois, je m'amuse à croiser deux VORs pour confirmer notre position, et je coche l'intersection sur la carte en notant l'heure de passage. Vincent maintient le Cessna dans un palier parfait, tout droit sur le cap prévu, et nos heures estimées (au prochain point, à l'arrivée, carburant restant...) sont toujours cohérentes et en phase avec celles du GPS. Si j'avais fait une aussi belle navigation le jour de mon test, j'aurais eu une mention.
Nous passons au dessus des formes fractales du lac Shasta, invisibles dans la nuit, et débouchons au dessus de la large vallée qui s'étend jusqu'à la baie de San Francisco. Loin sous nos roues, des îlots de lumière parsèment maintenant l'obscurité : villes, villages et fines routes bordées de lampadaires. Parfois le point isolé d'une voiture sur une route sans éclairage. Sur les aéroports de Redding et Red Bluff, nous distinguons les feux multicolores d'avions en mouvement.
Nous sommes tranquillement descendus à 6000 pieds en longeant la vallée. Ça fait deux heures que nous sommes partis de Klamath Falls, et nous approchons de notre destination. Après un virage à droite en direction du VOR de Scaggs Island, notre dernier point tournant, une masse noire et inquiétante se détache sur un horizon réchauffé par les lumières de la mégalopole. J'allume ma lampe et vérifie les altitudes de sécurité : devant nous, il y a bien une grosse colline qui culmine à 3000 pieds, mais nous croisons toujours à 6000, nous devrions passer largement au dessus. Pourtant, on dirait vraiment qu'une montagne nous barre la route. Prudemment, Vincent décide d'infléchir légèrement son cap vers le sud pour contourner l'obstacle supposé. La colline passe sous notre aile droite, et l'obstacle semble finalement n'être qu'un nuage posé sur son sommet. Comme quoi, tout n'est pas écrit sur les cartes.
En suivant les instructions du contrôleur de NORCAL, nous longeons la baie de San Francisco. Les innombrables lumières qui illuminent la région se reflètent en scintillant dans le miroir laqué de la mer. De nuit, tout est différent, mais nous retrouvons quand même nos repères : San Rafael Bridge, le Golden Gate et les hautes tours du centre ville, le Bay Bridge...
Vincent intègre le circuit en vent arrière pour la piste 27 droite, et il ajoute un deuxième atterrissage de nuit au Metropolitan Oakland International Airport à son tableau de chasse. Cette fois ci, pas besoin de suivre le Duchess : nous allons nonchalamment nous garer chez Kaiser, comme d'habitude.
(credits to Vincent pour cette image)
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Dans les locaux de Kaiser, nous retrouvons avec plaisir les Alex. Pendant notre allez-retour à Vancouver, ils ont eu le temps de visiter San Francisco et, une fois leur Cessna réparé, de faire un Bay Tour.
Mais il est tard, et nous sommes tous épuisés. Nous nous entassons à six dans la voiture de location des Alex et traversons le Bay Bridge pour rejoindre notre hôtel, à l'autre bout de San Francisco. Bien entendu, nous avons des chambres avec vue sur les pistes de KSFO, San Francisco International Airport.
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